Programme du Printemps des Laboratoires #4
Du 30 - 05 au 05 - 06 - 2016
Psychotropification de la société
Printemps des Laboratoires #4
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Le Café des Voix
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Disappear One
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Printemps des Laboratoires #4 / Jour 1
http://leslaboratoires.org/date/printemps-des-laboratoires-4-jour-1/le-printemps-des-laboratoires-4
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Printemps des Laboratoires #4 / Jour 2
http://leslaboratoires.org/date/printemps-des-laboratoires-4-jour-2/le-printemps-des-laboratoires-4
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Sous l’intitulé Psychotropification de la société, l’évènement du Printemps des Laboratoires, se propose pendant une semaine, du 30 mai au 5 juin, d’ouvrir à un plus large public et de développer en présence de nombreux intervenants – artistes, chercheurs et acteurs concernés – les recherches menées depuis octobre 2015 (en particulier via des ateliers de lecture quinzomadaires et du séminaire « Pratique de soin et Collectifs ») sur la « psychotropification de la société ».
L’expression Psychotropification, associant les termes « psychopharmacie » et « tropisme », désigne l’accroissement exponentiel de la médicamentation dans le cadre du traitement des troubles mentaux. En pointant ce « tropisme » notre intention est de démontrer que derrière l’augmentation et la banalisation des prescriptions médicales s’érige une idéologie normative qui infiltre et dirige les sociétés contemporaines, préoccupées par la liberté d’action à conférer à l’industrie pharmaceutique plutôt qu’aux individus qui les composent. Via des projections, conférences, performances, tables rondes et ateliers, nous tenterons durant une semaine de cerner les différents paradigmes que recoupe la problématique de la Psychotropification.
Nous sommes partis du constat d’une influence grandissante de l’industrie pharmaceutique, rejoint par certaines dérives psychiatriques enclines à réduire les individus à leur pathologie et à classifier l’humain selon des catégories de diagnostics médicaux. À l’inverse nous souhaitons, au cours de ces journées de mai et juin 2016, ouvrir à la possibilité d’être multiple et de réinventer des manières de vivre ensemble, en nous appuyant davantage sur l’acceptation d’expériences perceptives propre à chacun que sur la raison qui nous gouverne. Faisons de la place à nos morts et à nos invisibles, à nos visions, nos chimères et nos hallucinations, comme parties prenantes de nos constructions identitaires. Postulons des modes d’existences hétérogènes et non nécessairement rationnels, lesquels peuvent trouver des formes de cohabitations entre elles. Donnons la parole à des expériences différentes, à nos “devenir-minoritaires”, pour résister à un monde happé par la seule ambition d’efficacité et de rentabilité.
Pendant le week-end du 4 et 5 juin, la parole revient à ceux qui se sont engagés dans une critique des effets destructeurs de cette médicamentation (pour une sortie de la sentence médicale, contre l’imposition d’un modèle unique de corps et de comportement), à ceux qui se sont formés en collectif (le Réseau Français sur l’entente de voix, le collectif Dingdingdong) afin d’envisager un autre rapport à leur maladie que celui établi par les institutions, à ceux qui rendent à sa complexité et multiplicité la relation entre les vivants et les morts, à ceux qui ont renouvelé les méthodes thérapeutiques et les institutions (le réseau Cévennes par Fernand Deligny, la Clinique de La Borde par Jean Oury et Félix Guattari, le Centre d’ethnopsychiatrie Devereux par Tobie Nathan). Autant de questions abordées qui rejoignent les enjeux de la création artistique et nous amènent à explorer de plus près le lien fécond entre art et folie et les mécanismes de création qui en découlent. Le public est également convié à participer à des ateliers et performances : la performance chamanique de Grace Ndiritu conçue comme un recouvrement thérapeutique de l’âme par l’esprit collectif, l’atelier d’activation idiorythmique pour un enchevêtrement des sons et des mots proposé par Silvia Maglioni et Graeme Thomson, la création d’un lieu “repère” pour imaginer ensemble des pratiques collectives de soin porté par Josep Rafanell i Orra, dans la continuité du symposium qui s’est tenu aux Laboratoires entre janvier et mai dernier.
Des propositions hors les murs précéderont et prolongeront ces deux journées d’évènements : Le Café des Voix, projet artistique de Dora García, implanté au Pas si loin, café à Pantin, et animé en partenariat avec le Réseau Français sur l’entente de voix REV, ou encore la projection au cinéma d’art et d’essai albertivillarien Le Studio du dernier film, Disappear One, de Silvia Maglioni et Graeme Thomson, réalisé en collaboration avec des membres de la compagnie de théâtre UEINZZ.
Pendant ces deux jours, nous chercherons la langue apte à rendre justice aux différents acteurs qui se sont saisis de ces problèmes (des survivants ? experts ? militants ? concernés ? usagers ?), nous porterons attention aux termes employés dans le cadre de thérapies ou d’expériences de vie (maladie ? soin ? guérison ? rétablissement ?), nous expérimenterons ensemble la question de l’art comme espace de coexistence, de résistance, d’invention et d’outillage, d’intégration et de déploiement d’une folie ordinaire.
Alexandra Baudelot, Dora García, Mathilde Villeneuve
(Co-directrices des Laboratoires d’Aubervilliers)